azy, ça t'dit qu'on partage?

T'ouvres un oeil, légèrement la tête dans l'cul. T'es encore à moitié dans les bras d'morphée, à moitié réveillé. Tu sais même pas dans quelle journée tu viens d'te réveiller, tu cherches même plus à savoir. Pourquoi t'emmerder avec ça, en même temps? Pour rien, tu vas encore rien foutre d'ta journée, mis à part jouer l'gosse, comme d'habitude. Tu sais même plus dans quel mois t'es, tu sais même plus. Tu sais même pas quelle heure c'est, t'as pas envie d'te bouger l'cul pour aller ouvrir les rideaux. Tu comptes même pas bouger, rester là, comme une merde dans ton pieu. T'as rien à faire, d'toutes manières. Tu comptes pas chercher à faire quelque chose d'ta journée, tu sais même pas combien d'temps il t'reste, combien d'temps t'as pioncé. Paumé, t'es légèrement paumé. Dépassé, t'es complètement dépassé. Tu cherches même plus à r'trouver l'sens de ta vie. Tu veux juste rien foutre, où faire juste c'qu'il te plait, c'tout. T'es un putain d'branleur, vrai. Mais tu t'en tapes, tant qu't'as de quoi manger, d'quoi vivre. T'as tes frangins, 'fin surtout ta frangine qui s'occupe bien d'toi, même pas besoin d'taffer pour avoir d'la thune. Rien, absolument rien foutre. En même temps, tu vas pas t'plaindre. T'es bien, cool. Pourquoi t'faire chier à être comme les autres, les adultes? Pour rien, tu refuses même d'porter l'moindre costard, que dalle. Tu veux rester un gosse, même si tu passes pour d'la merde. Tu t'en tapes, absolument. Un putain d'gosse, trop innocent pour t'faire atteindre par les conneries du monde. T'veux juste être libre, c'tout. T'as pas d'rêve, t'veux juste rester l'même, rester un sale môme. Un p'tit merdeux, sans problèmes. Tu veux qu'on t'regarde toujours d'la même manière, t'veux pas qu'on t'apelle monsieur, c'tout; rien d'plus. Ton bide fait un bruit, t'as faim. «Merde, Riley?» L'écho d'ta voix te réponds, y'a personne. T'es l'seul dans la baraque? Non, c'pas tellement possible, famille d'branleurs en même temps. Mis à part Riley, et Andy, personne bosse. Surtout pas toi, ouai. En bref, personne pour t'servir dans ton pieu, où t'demander gentiment d'fermer ta gueule, c'est mauvais signe. Ça veut dire qu'tu vas devoir t'bouger le cul, et aller t'chercher à grailler. T'es même persuadé qu'tes égoïstes d'frangins t'ont rien laisser à manger, c'toujours comme ça. L'dernier à s'lever doit sortir pour aller s'chercher d'quoi faire taire son bide. T'as juste même pas l'courage d'te lever, merde. T'as même pas envie d'tourner la tête, simplement pour r'garder l'réveil posé sur ta table de chevet. Un putain d'glandeur, vrai. Dire que tu t'fiches d'avoir l'air de rien est un euphémisme, tu l'sais parfaitement. Tout l'monde dans c'te baraque, là, est un glandeur. Tu peux pas l'dire pour toute la famille, c'faux. T'en as bien deux qui bossent, même si tu sais parfaitement qu'Andy bosse juste pour s'mettre plus d'meufs dans la poche. Où plus d'thune, qu'importe l'point d'vue. En parlant d'thune, t'as pas encore eût ton argent d'poche, c'mois-ci, tu vas être à sec, l'genre de seule chose qui t'emmerderai vraiment. Sans fric, t'as pas d'quoi t'foutre du sucre dans l'sang. T'soupires, encore une fois. T'as vraiment pas l'courage, mais merde, rien qu'le bruit d'ton ventre t'agresse les tympans. Autant aller t'les défoncer encore plus en sortant dehors, avec un peu d'chance une bagnole passera en klaxonnant, pourquoi pas. Finalement, tu t'lèves, rejettant d'un air las tes draps sur ton pieu, sans trop faire gaffe. C'est qu'des draps, même pas toi qui t'emmerdes à les nettoyer, en plus. Ouai, t'as plutôt la belle vie. T'as même pas envie d'passer par l'étape douche, d'toutes manières t'es pas spécialement crade, tant mieux d'ailleurs. C'la dèche niveau motivation, aujourd'hui. T'attrapes deux trois fringues qui traînent dans la piaule, plutôt d'ton côté d'la pièce, ouai parce qu'en plus, tu dois partager la chambre avec ton frère, 'fin Danny. Et avec Wendy qui squattent, forcément, dès qu'Danny est quelque part, tu la trouves derrière. T'as même pas envie d'imaginer l'étât d'sa piaule, tu d'mandes sincèrement c'qu'elle peut bien foutre là dedans, même si l'idée d'poser l'pieds dans c'te pièce t'effleures même pas l'esprit. Ça doit être Bagdad, Fukushima, Nagasaki, Oroshima, et p'têt bien qu'Kathrina est passée par là.
T'enfiles les fringues, et tu sors d'la pièce, sans claquer la porte. La maison est d'jà pas mal au niveau des courants d'air, l'plus jeune s'occupe bien d'claquer les portes. T'avances dans l'couloir en traînant légèrement les pieds, toujours pas motivé. En même temps, t'aurais dut planquer deux trois trucs sous ton matelas, t'aurais même pas eut besoin d'sortir, surtout que t'espères qu'les magasins soient encore ouverts. T'as même pas idée d'l'heure, chanceux comme t'es, tu t'attends au pire. T'es même pas sûr d'avoir un peu d'thune dans ta poche, t'espères. Si tu t'fies au bruit qu'ça fait quand tu la tapotes, t'es légèrement rassuré. Après c'pas dit que t'ais assez, même si t'es plutôt doué pour gratter deux trois euros en faisant les yeux doux. Autant t'servir de ta gueule plutôt que d'dépenser trop. L'trajet est pas trop long, en plus. 'Fin si tu coupes par deux trois raccourcis qu't'as trouvé, limite en traversant les jardins des voisins, c'pas un soucis pour toi. Pas qu'tu cherches spécialement les emmerdes, au contraire. T'es plutôt du genre à les éviter, si t'es seul. Limite, avec deux trois autres Angry Birds, c'pas du tout un problème, tu vas t'lâcher. Là, t'es seul, t'as la dalle, pas l'moment d'chercher d'la merde là où y'en a pas. Tu t'fais souvent discret d'toutes manières, dans l'genre type mystérieux, t'es pas mal. Tu veux simplement pas qu'on s'mêle de toi, même si t'es l'premier à aller jouer l'gentil gosse avec les autres. Dans l'genre j't'aide mais j'veux que dalle en retour, même si ça s'applique pas tellement à tout l'monde, adkins exclus. Dehors, t'observes rapidement l'ciel, encore clair. C'est bon, ça doit être midi, un truc du style. T'en sais rien, t'façon. Direction l'chesters bar, à force l'type qui sert doit être habitué à voir ta gueule. C'légèrement l'endroit où tu vas tout les jours, histoire d'te refaire un stock d'merdes. Tu pousses la porte du bar/café, poussant un léger soupir. Ayé, t'es arrivé. C'pas qu'le trajet t'sois parut long. J'm'emmerde même pas à faire la queue, et j'passe devant tout l'monde, en général ça passe crème. «L'dernier kinder bueno.» Et vas-y qu'l'autre commence à t'emmerder, apparement elle voulait la même chose qu'toi. T'es limite vénère, mais t'es toujours pas du genre à t'énerver, t'es trop bon au fond. Tu soupires, alors qu'une autre personne s'la joue incruste en t'disant d'faire comme dans la pub. La pub? Avec Tsonga, ah ouai. Tu la regardes dans les yeux avec un air qu'tu veux d'malheureux, manque plus qu'ton ventre fasse des siennes et t'donnerais presque l'cesar du meilleure acteur. T'espères qu'ça la calme un tantinet, t'as d'l'estime pour ta propre gueule d'pauvre gamin, d'toutes manières. «J'suis vraiment désolé, mais on peut rien r'fuser à Tsonga, hein? J'vous propose même d'le payer moi-même, c'l'offre du siècle.» Encore faut-il qu't'ais assez d'thune, c'qui n'est pas sûr. Au pire, elle t'envoie chier, même si tu préfèrerais pas, tu t'arrangerais avec l'type pour payer. Surtout qu'ça ferait encore plus patienter les autres clients, c'qui est pas bon pour lui.